09-26-2002, 08:43 AM 
	
	
	
		                    (source non verifiee)
Libé:
Le débat des états généraux sur la sécurité routière (1) n'avait pas encore
commencé que le coupable était déjà désigné : la vitesse ! Cette litanie
revient depuis vingt-cinq ans, à chaque fois qu'un gouvernement fait mine
de s'intéresser au problème. Les radars se modernisent et se multiplient le
long des routes mais les chiffres, têtus, refusent de traduire une baisse
significative de la fatalité routière. N'y a-t-il pas là matière à une
réflexion plus poussée ?
Jacques Chirac a fait de la sécurité routière l'un des grands chantiers de
son quinquennat. On pouvait s'en réjouir. Il n'a cependant pas fallu
attendre longtemps pour comprendre qu'encore une fois le scénario était
écrit d'avance. Dans ses arbitrages budgétaires, le gouvernement ne
vient-il pas de revoir à la baisse l'enveloppe destinée au ministère des
Transports ? Que l'on nous explique comment on espère améliorer
significativement la situation sur les routes avec moins de moyens !
On attendra donc pour voir les forces de l'ordre s'équiper des éthylotests
et éthylomètres dont elles manquent cruellement. On attendra pour voir plus
de gendarmes à la sortie des discothèques le week-end (les jeunes de15 à 24
ans représentent 13 % de la population, mais 27 % des morts sur la route,
dont la moitié se tue les nuits de week-end). On attendra pour la mise en
place du ferroutage, qui allégerait le réseau des trop nombreux poids
lourds qui l'encombrent (ils représentent 6 % du parc roulant mais sont
impliqués dans 13 % des accidents mortels). On attendra pour l'aménagement
des nombreux points noirs qui subsistent encore sur le réseau routier
français. On attendra pour voir des autoroutes gratuites (4,4 fois moins
dangereuses que les routes nationales), comme elles étaient censées le
devenir après amortissement. On attendra pour une meilleure formation des
conducteurs et un suivi du permis de conduire, avec, comme cela se pratique
dans de nombreux pays, une visite médicale obligatoire pour les personnes
âgées. On attendra pour voir les cyclomotoristes (5 % des tués) avoir des
engins immatriculés qui ne les incitent plus à brûler les feux rouges. On
attendra pour voir des policiers plus nombreux sanctionner les manquements
aux règles de base de la conduite (conduire à droite, signaler un
changement de direction, etc.) qui engendrent un climat délétère sur les
routes... Tout cela, en effet, coûte cher, très cher !
On n'attendra pas, en revanche, pour voir apparaître de nouveaux radars.
Avec, cette fois, une géniale trouvaille : l'automatisme, prometteur d'une
rentabilité encore meilleure.
La vitesse comme unique coupable, la vitesse comme responsable de toute la
misère des routes de France. Les pouvoirs publics continuent à la trouver
très «politiquement correcte». Facile à mesurer et donc à réprimer
(radars), elle peut rapporter gros (amendes) et permet, à peu de frais, de
donner l'impression que l'on s'occupe vraiment du problème. Elle permet
également de ménager les lobbies de l'alcool et du transport routier. Elle
freine les ventes des grosses voitures étrangères, allemandes en
particulier. Elle contribue à diminuer la facture pétrolière. Enfin, et
surtout, elle permet de fortement culpabiliser les automobilistes.
Cynique ? Irresponsable ? Chacun peut se faire son idée grâce à un document
incontestable : le bilan annuel de l'Observatoire national interministériel
de sécurité routière. Alors que l'on ne manque pas de nous rappeler que la
France est le cancre de la classe européenne en la matière, on y découvre
de quoi relativiser grandement cette affirmation. Car s'il est un fait que
le nombre de tués (8 079 en l'an 2000) est l'un des plus élevés, le nombre
d'accidents corporels (121 223) et, partant, de blessés, est, en revanche,
l'un des plus bas : deux fois inférieur à celui du Royaume-Uni (242 117),
dont la population est pourtant équivalente, et trois fois moindre que
celui de l'Allemagne (382 949).
De cancre, la France ferait tout à coup presque figure de bon élève malgré
une spécificité qui s'explique par sa situation géographique. Avec une
densité de population nettement inférieure aux pays cités et un réseau
routier nettement plus important (2,5 fois plus de kilomètres qu'au
Royaume-Uni et un tiers de plus qu'en Allemagne), la France a en effet une
proportion nettement plus importante de routes départementales ; or, on
sait que ce sont les plus dangereuses, puisqu'elles concentrent, à elles
seules, plus de la moitié des morts de l'Hexagone. En Angleterre et en
Allemagne, les autoroutes absorbent un trafic nettement plus important pour
la bonne raison qu'il y en a plus et qu'elles sont gratuites.
Le nombre important d'accidents recensés sur les routes anglaises, où l'on
roule pourtant moins vite qu'en France, comme le nombre de tués au
kilomètre parcouru sur les autoroutes allemandes, près de deux fois
inférieur à celui enregistré sur les autoroutes françaises malgré l'absence
de limitation, attestent que, si la vitesse est toujours un facteur
aggravant, elle n'est que rarement la cause première de l'accident.
Alors qu'elle figure presque systématiquement dans les rapports d'accidents
comme cause par défaut, en l'absence d'autres facteurs clairement
identifiés, elle n'est ainsi jugée responsable que de 7 % des fatalités sur
autoroute, en France, loin derrière la fatigue et l'inattention (première
cause, avec 30 %). D'où certainement l'explication des bons chiffres
enregistrés en Allemagne : la bonne vitesse est, semble-t-il, celle qui
permet de rester concentré sur sa conduite.
Il paraît légitime de penser sauver des vies grâces aux limitations de
vitesse, ne fût-ce qu'en diminuant les conséquences des accidents. Mais il
se révèle très pernicieux de vouloir utiliser la vitesse comme un paravent
destiné à dissimuler des causes bien réelles. Car il ne faut pas se voiler
la face. Le vrai mal français, c'est l'alcool. Présent dans plus d'un tiers
des accidents mortels et pourtant si peu réprimé !
On a aujourd'hui au bas mot 500 fois plus de chances de se faire contrôler
sa vitesse que son taux d'alcoolémie. Chacun peut faire son propre sondage
autour de lui. Rares sont les personnes qui ont été contrôlées plus d'une
fois ou deux dans leur vie, et nombreuses celles qui ne l'ont jamais été.
On a, en revanche, toutes les chances de passer plusieurs fois devant un
radar sur un seul trajet Paris-Marseille. En Allemagne, on roule à 180 km/h
sur les autoroutes mais on sait que l'on aura l'occasion de souffler en
moyenne trois fois par an dans un ballon...
On comprend qu'avant de nous parler de brider les moteurs des voitures (ce
qui n'empêchera pas de rouler à 130 km/h sur les départementales), les
pouvoirs publics feraient bien de prendre leurs responsabilités à bras le
corps. En réduisant l'insécurité routière à une seule cause majeure, la
vitesse, et donc à une seule solution, sa limitation, ils se condamnent à
l'inefficacité et font preuve d'une mauvaise foi coupable, démobilisant les
automobilistes de leur conduite et détournant leur attention des causes
multiples d'accident.
	
	
	
	
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Le débat des états généraux sur la sécurité routière (1) n'avait pas encore
commencé que le coupable était déjà désigné : la vitesse ! Cette litanie
revient depuis vingt-cinq ans, à chaque fois qu'un gouvernement fait mine
de s'intéresser au problème. Les radars se modernisent et se multiplient le
long des routes mais les chiffres, têtus, refusent de traduire une baisse
significative de la fatalité routière. N'y a-t-il pas là matière à une
réflexion plus poussée ?
Jacques Chirac a fait de la sécurité routière l'un des grands chantiers de
son quinquennat. On pouvait s'en réjouir. Il n'a cependant pas fallu
attendre longtemps pour comprendre qu'encore une fois le scénario était
écrit d'avance. Dans ses arbitrages budgétaires, le gouvernement ne
vient-il pas de revoir à la baisse l'enveloppe destinée au ministère des
Transports ? Que l'on nous explique comment on espère améliorer
significativement la situation sur les routes avec moins de moyens !
On attendra donc pour voir les forces de l'ordre s'équiper des éthylotests
et éthylomètres dont elles manquent cruellement. On attendra pour voir plus
de gendarmes à la sortie des discothèques le week-end (les jeunes de15 à 24
ans représentent 13 % de la population, mais 27 % des morts sur la route,
dont la moitié se tue les nuits de week-end). On attendra pour la mise en
place du ferroutage, qui allégerait le réseau des trop nombreux poids
lourds qui l'encombrent (ils représentent 6 % du parc roulant mais sont
impliqués dans 13 % des accidents mortels). On attendra pour l'aménagement
des nombreux points noirs qui subsistent encore sur le réseau routier
français. On attendra pour voir des autoroutes gratuites (4,4 fois moins
dangereuses que les routes nationales), comme elles étaient censées le
devenir après amortissement. On attendra pour une meilleure formation des
conducteurs et un suivi du permis de conduire, avec, comme cela se pratique
dans de nombreux pays, une visite médicale obligatoire pour les personnes
âgées. On attendra pour voir les cyclomotoristes (5 % des tués) avoir des
engins immatriculés qui ne les incitent plus à brûler les feux rouges. On
attendra pour voir des policiers plus nombreux sanctionner les manquements
aux règles de base de la conduite (conduire à droite, signaler un
changement de direction, etc.) qui engendrent un climat délétère sur les
routes... Tout cela, en effet, coûte cher, très cher !
On n'attendra pas, en revanche, pour voir apparaître de nouveaux radars.
Avec, cette fois, une géniale trouvaille : l'automatisme, prometteur d'une
rentabilité encore meilleure.
La vitesse comme unique coupable, la vitesse comme responsable de toute la
misère des routes de France. Les pouvoirs publics continuent à la trouver
très «politiquement correcte». Facile à mesurer et donc à réprimer
(radars), elle peut rapporter gros (amendes) et permet, à peu de frais, de
donner l'impression que l'on s'occupe vraiment du problème. Elle permet
également de ménager les lobbies de l'alcool et du transport routier. Elle
freine les ventes des grosses voitures étrangères, allemandes en
particulier. Elle contribue à diminuer la facture pétrolière. Enfin, et
surtout, elle permet de fortement culpabiliser les automobilistes.
Cynique ? Irresponsable ? Chacun peut se faire son idée grâce à un document
incontestable : le bilan annuel de l'Observatoire national interministériel
de sécurité routière. Alors que l'on ne manque pas de nous rappeler que la
France est le cancre de la classe européenne en la matière, on y découvre
de quoi relativiser grandement cette affirmation. Car s'il est un fait que
le nombre de tués (8 079 en l'an 2000) est l'un des plus élevés, le nombre
d'accidents corporels (121 223) et, partant, de blessés, est, en revanche,
l'un des plus bas : deux fois inférieur à celui du Royaume-Uni (242 117),
dont la population est pourtant équivalente, et trois fois moindre que
celui de l'Allemagne (382 949).
De cancre, la France ferait tout à coup presque figure de bon élève malgré
une spécificité qui s'explique par sa situation géographique. Avec une
densité de population nettement inférieure aux pays cités et un réseau
routier nettement plus important (2,5 fois plus de kilomètres qu'au
Royaume-Uni et un tiers de plus qu'en Allemagne), la France a en effet une
proportion nettement plus importante de routes départementales ; or, on
sait que ce sont les plus dangereuses, puisqu'elles concentrent, à elles
seules, plus de la moitié des morts de l'Hexagone. En Angleterre et en
Allemagne, les autoroutes absorbent un trafic nettement plus important pour
la bonne raison qu'il y en a plus et qu'elles sont gratuites.
Le nombre important d'accidents recensés sur les routes anglaises, où l'on
roule pourtant moins vite qu'en France, comme le nombre de tués au
kilomètre parcouru sur les autoroutes allemandes, près de deux fois
inférieur à celui enregistré sur les autoroutes françaises malgré l'absence
de limitation, attestent que, si la vitesse est toujours un facteur
aggravant, elle n'est que rarement la cause première de l'accident.
Alors qu'elle figure presque systématiquement dans les rapports d'accidents
comme cause par défaut, en l'absence d'autres facteurs clairement
identifiés, elle n'est ainsi jugée responsable que de 7 % des fatalités sur
autoroute, en France, loin derrière la fatigue et l'inattention (première
cause, avec 30 %). D'où certainement l'explication des bons chiffres
enregistrés en Allemagne : la bonne vitesse est, semble-t-il, celle qui
permet de rester concentré sur sa conduite.
Il paraît légitime de penser sauver des vies grâces aux limitations de
vitesse, ne fût-ce qu'en diminuant les conséquences des accidents. Mais il
se révèle très pernicieux de vouloir utiliser la vitesse comme un paravent
destiné à dissimuler des causes bien réelles. Car il ne faut pas se voiler
la face. Le vrai mal français, c'est l'alcool. Présent dans plus d'un tiers
des accidents mortels et pourtant si peu réprimé !
On a aujourd'hui au bas mot 500 fois plus de chances de se faire contrôler
sa vitesse que son taux d'alcoolémie. Chacun peut faire son propre sondage
autour de lui. Rares sont les personnes qui ont été contrôlées plus d'une
fois ou deux dans leur vie, et nombreuses celles qui ne l'ont jamais été.
On a, en revanche, toutes les chances de passer plusieurs fois devant un
radar sur un seul trajet Paris-Marseille. En Allemagne, on roule à 180 km/h
sur les autoroutes mais on sait que l'on aura l'occasion de souffler en
moyenne trois fois par an dans un ballon...
On comprend qu'avant de nous parler de brider les moteurs des voitures (ce
qui n'empêchera pas de rouler à 130 km/h sur les départementales), les
pouvoirs publics feraient bien de prendre leurs responsabilités à bras le
corps. En réduisant l'insécurité routière à une seule cause majeure, la
vitesse, et donc à une seule solution, sa limitation, ils se condamnent à
l'inefficacité et font preuve d'une mauvaise foi coupable, démobilisant les
automobilistes de leur conduite et détournant leur attention des causes
multiples d'accident.

 Je me permets de le mettre sur le forum auto si ce n'est deja fait...